Cour de cassation, 30 septembre 2003
Presse - Diffamation publique - Bonne foi - Immunité parlementaire

- Modifié le 28 mars 2016

Cour de Cassation Chambre criminelle

Audience publique du 30 septembre 2003

Cassation

N° de pourvoi : 03-80039

Publié au bulletin

Président : M. COTTE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trente septembre deux mille trois, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire DESPORTES, les observations de Me BALAT, de la société civile professionnelle MONOD et COLIN, de Me BLONDEL, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général LAUNAY ;

Statuant sur les pourvois formés par :

 X...,

 Y...,

 LA SOCIETE Z..., civilement responsable,

contre l’arrêt de la cour d’appel de VERSAILLES, 8e chambre, en date du 18 décembre 2002, qui, dans la procédure suivie contre les deux premiers pour diffamation publique envers un particulier, a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation proposé pour X..., pris de la violation des articles 23, 29, 32, 35, 41 de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, violation du principe de séparation des pouvoirs ;

en ce que l’arrêt infirmatif attaqué a dit que les éléments constitutifs de la diffamation publique envers un particulier étaient réunis à l’encontre de X..., et l’a condamné à verser à la FCTJF un euro à titre de dommages et intérêts, outre la publication à ses frais d’un communiqué de presse ;

aux motifs que, suivant les termes de l’article 41 de la loi du 29 juillet 1881, les rapports imprimés par ordre de l’Assemblée Nationale ou du Sénat ne peuvent donner ouverture à aucune action ; que ce texte est d’appréciation stricte et ne souffre aucune interprétation extensive ; que l’interview de X... ne se situe nullement dans le cadre étroit de la publication du rapport sur les « sectes et l’argent », s’agissant d’une enquête plus large sur l’influence des mouvements sectaires en France ; que le prévenu y est présenté comme un parlementaire particulièrement expert en la matière, et non en tant que rapporteur de la commission chargée d’en présenter les conclusions ; que les dispositions de l’article 41, alinéa 1er, de la loi sur la presse ne pouvaient recevoir application dès lors que les propos litigieux ne se situent pas dans le cadre dudit rapport, mais à l’occasion d’une interview dite de vulgarisation destinée à faire le point sur le poids des sectes dans le pays ;

et aux motifs que la légitimité du but poursuivi n’est pas en cause, X... étant fondé à éclairer un public de jeunes lecteurs sur les différents aspects de la lutte engagée contre les dérives de certains mouvements sectaires ;

que son expérience lui interdisait cependant de se contenter de termes approximatifs, de jugements à l’emporte-pièce et d’amalgames hâtifs ; que, à une question légitime, X... a répondu par un jugement de valeur sans nuance ni équivoque ; qu’émanant d’un des spécialistes les plus avertis en la matière, les termes de « criminalité internationale » ne peuvent être assimilés à des critiques des sectes, relevant d’un langage courant au sens de malfaisants, mais doivent être compris dans leur acception pénale ; que l’amalgame opéré entre des pratiques discutables et des discours antisociaux, d’une part, et des infractions caractérisées, d’autre part, établit l’absence de mesure dans le propos ; que X... ne peut non plus se prévaloir de la bonne foi en associant de manière délibérée les Témoins de Jéhovah à l’Eglise de Scientologie, impliquée à diverses reprises dans des scandales politico-financiers ; qu’en se livrant à l’amalgame décrit plus haut, X... a excédé la vivacité de ton habituelle qui pouvait être admise dans le cadre de la polémique provoquée dans l’opinion publique par les craintes légitimes suscitées par les phénomènes sectaires ; que le rapport d’enquête parlementaire ne contenait pas de mises en cause précises et significatives des Témoins de Jéhovah, au niveau de procédures ou de condamnations pénales impliquant ce mouvement ; que les premiers juges ne pouvaient, dès lors, énoncer que l’expression diffamatoire n’était que le résumé du rapport parlementaire ; que le bénéfice de la bonne foi ne saurait valablement être accordé à X... qui, outre l’absence de mesure dans l’expression, n’a cherché à aucun moment à s’en tenir de près aux conclusions des rapports d’enquête, se contentant d’approximations, d’autant plus condamnables, qu’elles émanaient d’un expert réputé en la matière ;

alors, d’une part, qu’ouvrent droit à l’immunité prévue par l’article 41 de la loi du 29 juillet 1881, les résumés et présentations, même partiels, des rapports imprimés par ordre de l’Assemblée Nationale ou du Sénat faits de bonne foi et dans le respect de l’esprit des rédacteurs ; que, pour exclure X..., député, du bénéfice de cette immunité, la cour d’appel énonce que les propos reprochés, destinés à faire le point sur le poids des sectes en France, ne se situeraient pas dans le cadre étroit de la publication du rapport « Les sectes et l’argent » rédigé par la commission d’enquête de l’Assemblée Nationale ; cependant que la première partie de ce rapport était consacrée à l’influence grandissante des mouvements sectaires en France, d’où il résulte que X..., interviewé sur ce point, s’est contenté de commenter de bonne foi, cette partie du rapport, à la rédaction duquel il avait participé en tant que parlementaire ; qu’ainsi, la cour d’appel n’a pas justifié légalement sa décision au regard des textes susvisés ;

alors, d’autre part, que, pour exclure X... du bénéfice de la bonne foi au sens des articles 35 et 41 de la loi du 29 juillet 1881, la cour d’appel affirme, en substance, que la confusion opérée entre des pratiques sectaires discutables et des discours antisociaux, d’une part, et des infractions caractérisées, d’autre part, établirait l’absence de mesure dans le propos, dès lors que le rapport « Les sectes et l’argent » ne contiendrait pas de mises en cause précises et significatives des Témoins de Jéhovah et que X... se serait ainsi contenté d’approximations et d’amalgames hâtifs ; que cependant, comme le faisait valoir X... dans ses écritures d’appel, le rapport parlementaire auquel se réfère la cour d’appel stigmatise bien l’existence de comportements pénalement répréhensibles imputables à la partie civile, laquelle, classée parmi les sectes de nature à causer des troubles à l’ordre public, figure, de même que l’Eglise de Scientologie, parmi les mouvements sectaires les plus fortunés et les plus attentatoires aux libertés individuelles ; qu’en statuant comme elle l’a fait, sans mieux s’en expliquer au regard des conclusions d’appel dont elle était régulièrement saisie, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ;

alors, en toute hypothèse, qu’outre les rapports imprimés par ordre de l’Assemblée Nationale ou du Sénat, ouvre également droit à l’immunité prévue par l’article 41 de loi du 29 juillet 1881, le compte-rendu des séances publiques de ces assemblées fait de bonne foi dans les journaux ; que, pour exclure X... du bénéfice de l’immunité prévue par l’article 41, alinéa 1er de la loi sur la presse, la cour d’appel énonce que les propos reprochés ne se situeraient pas dans le cadre étroit de la publication du rapport « Les sectes et l’argent » rédigé par la commission d’enquête de l’Assemblée Nationale ;

que cependant, en statuant ainsi, sans rechercher si, comme l’indiquait X... dans ses écritures d’appel, la remise d’un tel document au président de l’Assemblée Nationale n’était pas habituellement suivie d’un débat en séance publique aux fins de présentation des conclusions du rapport et si, préalablement à la constitution de la commission d’enquête, un débat en séance publique n’avait pas également été organisé aux fins pour les députés d’exprimer leurs inquiétudes devant l’ampleur de la criminalité internationale imputable aux mouvements sectaires, au nombre desquels les Témoins de Jéhovah, débats dont X... aurait pu rendre compte de bonne foi, sans dénaturation ou imputation malveillante, sous couvert de l’immunité prévue par l’article 41, alinéa 2, de la loi du 29 juillet 1881, la cour d’appel n’a pas justifié légalement sa décision au regard des textes susvisés, et violé le principe de la séparation des pouvoirs" ;

Sur le premier moyen de cassation proposé pour Y... et la société Z..., pris de la violation des articles 23, 29 et 32 de la loi du 29 juillet 1881, 2, 3, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

en ce que l’arrêt infirmatif attaqué a dit que les éléments constitutifs de la diffamation publique envers un particulier étaient réunis en l’espèce ;

aux motifs que, contrairement à ce que soutiennent les prévenus, la poursuite intentée par la requérante n’a pas pour objet de réfuter la terminologie de secte, dont serait qualifiée l’association des Témoins de Jéhovah ; que le fait de décrire un groupement, quel qu’il soit, comme fonctionnant sur le mode de la criminalité internationale, caractérise incontestablement l’imputation de faits précis, de nature à être, sans difficulté, l’objet d’un débat contradictoire, et qui portent atteinte à l’honneur et à la considération de ce groupement ; qu’en effet, pour un groupement ou une association, fonctionner sur le mode de la criminalité internationale organisée signifie que son action se base sur toute une série de délits et crimes contraires à la loi, qui plus est avec des ramifications internationales ; que ces termes sont employés pour qualifier les activités de type mafieux à caractère supra-national, que ces activités ont trait au grand banditisme, au trafic d’armes, au proxénétisme, au blanchiment d’argent sale, domaines dans lesquels aucun fait avéré n’a été mis au passif des Témoins de Jéhovah dans les rapports parlementaires ; qu’il y a lieu, sur ce point, de confirmer le jugement entrepris ; que sur le bénéfice de la bonne foi, la légitimité du but poursuivi n’est pas en cause, X... étant fondé à éclairer un public de jeunes lecteurs sur les différents aspects de la lutte engagée contre les dérives de certains mouvements sectaires ; que si l’expérience de X... en la matière en faisait tout naturellement un interlocuteur privilégié pour adresser un certain nombre de messages à ces jeunes lecteurs, elle lui interdisait de se contenter de termes approximatifs, de jugements à l’emporte-pièce et d’amalgames hâtifs ; qu’en l’espèce, à une question légitime, X... a répondu, par un jugement de valeur sans nuance ni équivoque ;

qu’émanant d’un des spécialistes les plus avertis en la matière, les termes de « criminalité internationale » ne peuvent être assimilés à des critiques des sectes, relevant d’un langage courant au sens de malfaisants, mais doivent être compris dans leur acception pénale ; que l’amalgame opéré entre des pratiques discutables et des discours antisociaux, d’une part, et des infractions caractérisées, d’autre part, établit l’absence de mesure dans le propos ; qu’à la différence d’une expression orale spontanée, il s’agit ici de la publication d’une interview dans un mensuel, minutieusement préparée ; que ces propos qui s’inscrivent dans le combat que X... a décidé de mener pour la défense des libertés individuelles, tant au niveau personnel qu’au niveau associatif, dépassent par leur dureté, l’expression d’une opinion tendant à dénoncer les dérives néfastes d’un mouvement sectaire ; que X... ne peut non plus se prévaloir de la bonne foi en associant de manière délibérée les Témoins de Jéhovah à l’Eglise de Scientiologie, impliquée à diverses reprises dans des scandales politico-financiers ; qu’en se livrant à l’amalgame décrit plus haut, X... a excédé la vivacité de ton habituelle qui pouvait être admise dans le cadre de la polémique provoquée dans l’opinion publique par les craintes légitimes suscitées par les phénomènes sectaires ;

que le rapport d’enquête parlementaire ne contenait pas de mises en cause précises et significatives des Témoins de Jéhovah, au niveau de procédures ou de condamnations pénales impliquant ce mouvement ; que les premiers juges ne pouvaient, dès lors, énoncer que l’expression diffamatoire n’était que le résumé du rapport parlementaire ; qu’en conséquence, le bénéfice de la bonne foi ne saurait valablement être accordé à X... qui, outre l’absence de mesure dans l’expression, n’a cherché à aucun moment à s’en tenir de près aux conclusions des rapports d’enquête, se contentant d’approximations, d’autant plus condamnables, qu’elle émanait d’un expert réputé en la matière ; qu’Y... et la société Z... ne peuvent non plus s’en prévaloir, dans la mesure où une telle interview à caractère nécessairement polémique, présentée de manière en apparence neutre, se devait néanmoins de recadrer l’expression incriminée, et surtout de présenter contradictoirement l’argumentation du groupement violemment mis en cause ; qu’il y a lieu en conséquence de réformer le jugement entrepris et de dire que les éléments constitutifs de la diffamation sont réunis en l’espèce, à l’égard de l’ensemble des procédures ;

alors, d’une part, qu’il résulte des extraits du rapport d’enquête parlementaire du 10 juin 1999, reproduits à l’identique dans les conclusions d’appel de la partie civile, que les parlementaires y ont notamment observé (page 170) que, « s’agissant des dons versés par les Témoins de Jéhovah, la Commission a relevé un second phénomène d’évasion fiscale qui montre, une nouvelle fois, la capacité de la secte à adapter ses pratiques aux règles imposées par le droit » ; qu’en estimant dès lors que X..., en déclarant que la secte des Témoins de Jéhovah fonctionne sur le mode de la criminalité internationale, ne pouvait se réclamer des conclusions de cette commission d’enquête qui n’aurait pas directement mis en cause des comportements frauduleux imputables à la partie civile, la cour d’appel a dénaturé le rapport d’enquête parlementaire susvisé ;

et alors, d’autre part, que la légitimité du but poursuivi, l’absence d’animosité personnelle, la prudence et la mesure dans l’expression ainsi que la qualité de l’enquête sont de nature à caractériser la bonne foi du journaliste ; qu’en l’espèce, en se déterminant par la circonstance qu’Y... et la société Z... auraient dû recadrer l’expression incriminée employée par X... et présenter contradictoirement l’argumentation du groupement mis en cause, pour en déduire qu’ils ne pouvaient se prévaloir de leur bonne foi, sans rechercher, ainsi qu’elle y était pourtant invitée, si, en l’état du rapport d’enquête parlementaire désignant les Témoins de Jéhovah comme une secte potentiellement dangereuse, et eu égard à la qualité de la personne interrogée, membre de la commission parlementaire ayant établi ledit rapport, le journaliste ayant recueilli les propos litigieux n’était pas en droit de considérer que ceux-ci étaient conformes aux faits dénoncés par la commission parlementaire, et partant n’avait fait preuve d’aucun comportement imprudent de nature à exclure sa bonne foi, la cour d’appel a privé sa décision de toute base légale ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, lors d’un entretien accordé à la revue « 15-25 ans.com » et publié dans le numéro de septembre 2001, X..., député et rapporteur de la commission d’enquête parlementaire sur la situation financière, patrimoniale et fiscale des sectes ainsi que sur leurs activités économiques et leurs relations avec les milieux économiques et financiers, a tenu les propos suivants : « Mais une chose est sûre : des sectes comme les Témoins de Jéhovah ou la Scientologie fonctionnent aujourd’hui sur le mode de la criminalité internationale, avec des ramifications insoupçonnées et un immense pouvoir, y compris de lobbying » ;

qu’à la suite de la publication de ces propos, l’association Fédération chrétienne des Témoins de Jéhovah de France a fait citer X..., Y..., directeur de la publication de la revue précitée et la société Z..., éditrice de cette revue, du chef de diffamation publique envers un particulier sur le fondement des articles 29, alinéa 1er, et 32, alinéa 2, de la loi du 29 juillet 1881 ; que le tribunal a relaxé les prévenus et débouté la partie civile de ses demandes ; que celle-ci a interjeté appel du jugement ;

Attendu que, pour écarter les moyens de défense des intimés, qui invoquaient l’immunité prévue par l’article 41, alinéa 2, de la loi du 29 juillet 1881 et le bénéfice de la bonne foi, infirmer le jugement entrepris et dire l’infraction établie, la cour d’appel retient que les propos litigieux, qui insinuent que les Témoins de Jéhovah se livreraient à des activités de type mafieux en relation avec le grand banditisme, ne constituent pas un compte rendu fidèle du rapport de la commission d’enquête précité, lequel ne faisait pas état de « mises en cause précises et significatives » des Témoins de Jéhovah devant les juridictions pénales ; que les juges ajoutent que, s’il était légitime de chercher à informer de jeunes lecteurs sur les différents aspects de la lutte contre les sectes, il appartenait néanmoins à X..., expert réputé en la matière, de veiller, dans un entretien « minutieusement préparé », à ne pas user de termes approximatifs et à ne pas procéder à des amalgames hâtifs ; que les juges concluent que l’intéressé, qui ne s’est pas fondé sur des éléments d’appréciation sérieux, a manqué de mesure dans l’expression de sa pensée ; qu’ils précisent qu’en sa qualité de directeur de la publication, Y... aurait dû faire apparaître le caractère polémique des propos litigieux, présentés comme objectifs, et permettre à l’association violemment mise en cause de présenter son argumentation ;

Attendu qu’en prononçant ainsi, par des motifs exempts d’insuffisance ou de contradiction et répondant aux chefs péremptoires des conclusions qui lui étaient soumises, lesquelles ne citaient aucun passage du rapport de la commission d’enquête de nature à corroborer les propos critiqués, la cour d’appel a justifié sa décision ;

Que X... ne saurait reprocher à celle-ci de n’avoir pas recherché si les propos litigieux n’étaient pas le compte rendu de débats qui se seraient tenus au sein de l’Assemblée Nationale à l’occasion des travaux de ladite commission dès lors qu’il ne résulte d’aucune énonciation de l’arrêt attaqué, ni d’aucunes conclusions régulièrement déposées qu’il ait développé une telle argumentation devant les juges du second degré ;

D’où il suit que les moyens doivent être écartés ;

Mais sur le deuxième moyen de cassation proposé pour Y... et la société Z..., pris de la violation des articles 23, 29 et 32 de la loi du 29 juillet 1881, 2, 3, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

en ce que l’arrêt attaqué a ordonné « aux frais de Y..., du journal 15-25 ans.com et de X... », la publication, dans un quotidien national, dans la limite d’un coût de 2 500 euros, d’un communiqué mentionnant la condamnation prononcée, ainsi qu’une publication identique dans le mensuel « 15-25 ans.com » ;

alors que, dans ses conclusions d’appel, la partie civile demandait à la cour d’appel d’ordonner, « à titre de dommages-intérêts complémentaires, la diffusion du jugement à intervenir » dans la revue « 15-25 ans.com » ainsi que « dans un quotidien national, par extrait, aux frais des prévenus, sans que le coût de chaque insertion n’excède 2 000 euros » ; que, dès lors, en ordonnant une publication « dans un quotidien national, dans la limite d’un coût de 2 500 euros », la cour d’appel, qui a méconnu les limites du litige, a excédé ses pouvoirs ;

Vu les articles 459 et 464 du Code de procédure pénale ;

Attendu que les juges du fond ne peuvent se prononcer sur les réparations civiles que dans les limites des conclusions dont ils sont saisis ;

Attendu que, dans ses conclusions déposées devant les juges du second degré, l’association Fédération chrétienne des Témoins de Jéhovah de France a demandé, notamment, que soit ordonnée aux frais des intimés « à titre de dommages-intérêts complémentaires », la diffusion du jugement par extrait dans un quotidien national, « sans que le coût n’excède 2 000 euros » ;

Attendu que, par l’arrêt attaqué, la cour d’appel a ordonné la diffusion demandée, en fixant à 2 500 euros le coût maximum de celle-ci ;

Mais attendu qu’en prononçant ainsi, la cour d’appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus énoncé ;

D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Et sur le troisième moyen de cassation proposé pour la société Z..., pris de la violation des articles 23, 29 et 32 de la loi du 29 juillet 1881, 2, 3, 427, 475-1, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

en ce que l’arrêt attaqué a condamné « le journal 15-25 ans.com » à payer à la Fédération chrétienne des Témoins de Jéhovah de France la somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article 475-1 du Code de procédure pénale ;

alors que seul l’auteur de l’infraction, à l’exclusion de la personne civilement responsable, peut être condamné à payer à la partie civile une indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 475-1 du Code de procédure pénale ;

que, dans ses conclusions d’appel, la Fédération chrétienne des Témoins de Jéhovah de France, qui certes demandait qu’il soit jugé que X... et Y... s’étaient rendus coupables du délit de diffamation publique envers un particulier, se bornait, s’agissant de la société Z..., à la mettre en cause en sa qualité de civilement responsable d’Y... ; qu’elle ne pouvait donc demander sa condamnation sur le fondement des dispositions de l’article 475-1 du Code de procédure pénale et qu’en statuant comme elle l’a fait de ce chef, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

Vu l’article 475-1 du Code de procédure pénale ;

Attendu que, selon ce texte, seul l’auteur de l’infraction peut être condamné à payer à la partie civile la somme que le juge détermine, au titre des frais non payés par l’Etat et exposés par celle-ci ;

Attendu que, par l’arrêt attaqué, la cour d’appel a condamné la société Z..., en qualité de civilement responsable, à payer une somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article précité ;

Mais attendu qu’en prononçant ainsi, la cour d’appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé ;

D’où il suit que la cassation est également encourue de ce chef ;

Par ces motifs ;

CASSE et ANNULE l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Versailles, en date du 18 décembre 2002, mais seulement en ce qu’il a condamné la société Z... à payer à la partie civile une somme de 4 000 euros au titre de l’article 475-1 du Code de procédure pénale, et en ce qu’il a fixé à 2 500 euros le coût maximal de la publication ordonnée à titre de réparation civile, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

DIT que le coût maximal de la publication ordonnée à titre de réparation civile est fixé à 2 000 euros ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Versailles, sa mention en marge où à la suite de l’arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;